samedi 19 avril 2008

A propos de ce Blog...

Ce blog a pour objectif d’aborder une question d’actualité touchant le domaine de la comptabilité de management. En effet, comme vous savez peut-être, les enjeux de la comptabilité de management croisent ceux d’autres domaines, notamment le marketing, la gestion environnementale, la gouvernance et la gestion du changement. C’est sur l’idée d’un croisement entre les domaines de la comptabilité de management et de la gouvernance que j’ai choisi d’élaborer ce blog.
Ce dernier se concentrera plus particulièrement sur la place de la comptabilité de management dans l’élaboration d’une bonne gouvernance d’entreprise. Ce blog se veut informatif et doit permettre aux professionnels d’avoir une meilleure vue de la problématique aujourd’hui. Le traitement de ce sujet se fera par la publication de différents billets abordant chacun un aspect particulier.

Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une bonne lecture.

Qu'est-ce que la gouvernance?

Le terme de gouvernance est défini et entendu aujourd’hui de manière très diverse et parfois contradictoire. Ce mot peut en effet prendre plusieurs sens, mais malgré cela il existe une dynamique commune dans l'usage de ce terme. La plupart du temps lorsque ce terme est employé il se réfère avant tout à un mouvement de « décentrement » de la prise de décision, avec une multiplication des lieux et des acteurs impliqués dans cette décision. Il renvoie à la mise en place de nouveaux modes de régulation plus souples, fondés sur le partenariat entre différents acteurs.

On distingue ainsi deux grands types de gouvernance: la gouvernance d'entreprise pour le secteur privé et la gouvernance politique pour la pensée politique et administrative.

On va s’intéresser ici uniquement au gouvernement d’entreprise ou « corporate governance » en anglais.

Définition :
« Dans une acception large, la gouvernance d'entreprise ou corporate gouvernance représente l'organisation du contrôle et de la gestion de l'entreprise. De façon plus étroite, le terme de gouvernance d'entreprise est utilisé pour désigner l'articulation entre l'actionnaire et la direction de la société, et donc principalement le fonctionnement du conseil d'administration ou du directoire et du conseil de surveillance. » (Vernimmen)

La gouvernance inclut ainsi les relations entre les nombreux acteurs impliqués dans la vie de l’entreprise (les parties prenantes, ou stakeholders) et les objectifs qui la gouvernent.

Les nombreux scandales financiers de ces dernières années ont fait émerger la bonne gouvernance comme un thème fondamental pour les entreprises, cotées ou non, qui veulent asseoir la confiance de leurs actionnaires de plus en plus exigeants, tout en se donnant le maximum de chances d'être performantes sur le long terme.
Ces différents scandales financiers sont donc à l’origine de nouvelles lois comme le Sarbanes-Oxley Act (SOX) aux Etats-Unis ou la Loi sur la Sécurité Financière (LSF) en France - Comparaison des deux lois ici -

Le contrôle de gestion : élément clé de la gouvernance

Le contrôle de gestion a pour mission non pas uniquement de contrôler comme son nom l’indique, mais plutôt de contribuer activement au pilotage global de l'organisation dans une perspective d'amélioration de la performance économique. Il est important de comprendre la place de cette fonction essentielle. Le contrôle de gestion est quelque part un facilitateur de la prise de décision. Il exerce également de part sa position stratégique à la croisée des sources d'information, une forme de surveillance. Un rôle salutaire en ces temps d'incertitudes. Le contrôle de gestion joue donc un rôle clé dans le pilotage d'organisations toujours plus complexes. En charge de la modélisation efficace de la gestion de l'information économique, le contrôle de gestion est vraisemblablement l'organe pivot de l'assistance à la mise en œuvre de la stratégie et du suivi de son efficacité.

Parmi les auteurs majeurs du sujet, on retiendra notamment, Henri Bouquin, qui a publié de nombreux ouvrages sur ce thème.
Pour lui, le contrôle de gestion rempli trois fonctions :
- le contrôle de gestion recouvre des dispositifs d’aide au pilotage et à la délégation (enjeu de « gouvernance »)
- il décalque le modèle économique (« business model ») de l’entreprise pour modéliser les facteurs importants du pilotage dont dépend la performance de l’entreprise
- ce modèle, donc le contrôle de gestion, découle de la stratégie de l’entreprise (boucle stratégie-contrôle).

« Maîtriser le pilotage d'une entreprise, c'est, d'abord, réussir en permanence à "décliner" son modèle économique (business model) et sa stratégie à tous les niveaux de l'organisation. Le contrôle de gestion est l'instrument privilégié de cette déclinaison. » (H. Bouquin)




Selon le modèle développé par Sloan et Brown à la General Motors (1921), le contrôle de gestion peut être modélisé ainsi :



Le contrôle de gestion est donc un élément clé de la gouvernance qu’il convient donc de vérifier afin de voir s’il répond bien aux règles de bonne gouvernance édictées.
Le contrôle de gestion appartient au processus de vérification du « contrôle interne », ce dernier peut être définit ainsi :
« Le contrôle interne est défini globalement comme un processus, mis en œuvre par le conseil d’administration, le management et les autres membres du personnel, conçu pour donner une assurance raisonnable quant à la réalisation des objectifs dans les catégories suivantes :
- l’efficacité et l’efficience des opérations,
- la fiabilité de l’information financière,
- la conformité aux lois et règlements en vigueurs. » (COSO)

Gouvernance d'entreprise et comptabilité

Le rôle de la comptabilité est de produire de l’information sur le processus de création de valeur afin de satisfaire une demande interne et externe. Sur le plan interne, la demande émane principalement des dirigeants ; ils souhaitent pouvoir piloter le processus de création de valeur et disposer d’un outil permettant de trancher les éventuels litiges avec les différentes parties prenantes. Sur le plan externe, l’information comptable doit permettre aux tiers de s’informer sur l’intérêt de la transaction et les risques encourus.

La gouvernance d’entreprise doit donc pouvoir satisfaire aux différentes demandes en gérant la qualité des informations et des données comptables. Il existe deux visions de la gouvernance.

- la vision actionnariale de la gouvernance

La théorie actionnariale de la gouvernance constitue une application de la théorie de l’agence issue notamment des travaux de Jensen et Meckling (1976) et Jensen (1983). Ils définissent une relation d'agence comme un contrat par lequel une ou plusieurs personnes (le principal) engage une autre personne (l'agent) pour accomplir quelques services en leur nom, impliquant la délégation d'une partie de l'autorité de prise de décision à l'agent. De part sa nature, la relation d'agence pose problème dans la mesure où les intérêts personnels du principal et de l'agent sont divergents.

En application, la théorie de l’agence à peut être résumé ainsi :
- Le principal (stakeholders ou shareholders ?) et l’agent ont des préférences différentes quant aux décisions à prendre,
- Le principal ne peut pas observer l’action du manager, mais seulement le résultat,
- On sait quel est le « bon » résultat (transposition budgétaire),
- Le manager connaît mieux la situation que le principal (asymétrie d’information).

L’objectif de la gouvernance est de minimiser les coûts d’agence. Ces derniers correspondent aux pertes de valeur entraînées par les divergences d’intérêts entre les différentes parties prenantes (actionnaires, dirigeants, salariés, créanciers…) relativement à une situation idéale (rationalité illimitée des agents, perfection des marchés…) pour laquelle ces conflits pourraient se résoudre sans coût.
Ainsi, la théorie de l’agence propose une représentation fonctionnaliste de la gouvernance de la relation d’agence entre actionnaires et dirigeants : le conseil d’administration, le marché financier (via la cotation et les offres publiques) et le marché des dirigeants constitueraient des mécanismes visant à minimiser les coûts d’agence nés de cette relation.

- la vision partenariale de la gouvernance

L’approche actionnariale présente certaines limites puisque certaines réalités comptables sont difficilement explicables avec cette théorie. Par exemple, l’approche actionnariale ne permet pas d’expliquer de façon convaincante la demande d’information comptable légale émanant d’autres parties prenantes que les actionnaires (hypothèse d’efficience informationnelle des marchés). Mais aussi, l’observation du comportement des dirigeants révèle qu’ils portent plus d’intérêt à la comptabilité de gestion (interne) qu’à la comptabilité patrimoniale (externe) destinée aux tiers. L’information issue de la comptabilité de gestion, en raison de son caractère stratégique, est rarement communiquée aux actionnaires, même à ceux faisant partie du conseil d’administration : elle ne sert donc pas un objectif de contrôle.


La théorie partenariale ne rejette pas la théorie actionnariale mais retient une définition large de l’efficience (Milgrom et Roberts, 1992), selon laquelle une organisation est efficiente si elle produit en moyenne de meilleurs résultats pour l’ensemble des parties prenantes. Cette approche conduit à introduire la notion de valeur partenariale (Charreaux et Desbrières, 1998).
La théorie de la gouvernance accordant un rôle central aux principaux dirigeants, l’architecture du système de gouvernance s’explique en modélisant les relations qu’ils entretiennent avec les différentes parties prenantes. En outre, la définition de ce système relativement à l’espace discrétionnaire des dirigeants, c’est-à-dire à la latitude dont ils disposent pour gérer les différents contrats, conduit à centrer les recherches sur le processus de création de valeur partenariale (notamment sur le processus d’investissement) et non sur la seule sécurisation de l’apport de capital financier.

L’intérêt pour la comptabilité interne de gestion

L’approche actionnariale permet difficilement d’expliquer la comptabilité de gestion, dans la mesure où, sauf exception, les actionnaires n’ont pas accès à l’information interne. En revanche, la vision partenariale propose une explication naturelle de la comptabilité de gestion. Cette dernière constitue un outil efficace pour piloter et contrôler la création de valeur partenariale. Le dirigeant l’utilise pour appréhender et gérer sa latitude discrétionnaire ; elle lui permet de savoir où se crée la valeur, comment elle se répartit et quelles sont ses éventuelles marges de manœuvre et comment y-a-t-il la possibilité de répartir différemment la valeur sans compromettre la performance?

Par ailleurs, si la comptabilité externe constitue l’outil informationnel privilégié pour gouverner les relations d’agence avec les partenaires financiers, notamment les créanciers, la comptabilité interne sert davantage la gouvernance des transactions réalisées avec les partenaires industriels et commerciaux ainsi qu’avec les salariés. Seule, elle permet d’apporter des éléments d’information interne permettant de gérer les éventuels conflits d’intérêts, relatifs à la répartition de la valeur créée, liés à ces transactions.

La vision partenariale conduit donc à interpréter la comptabilité de gestion comme l’outil permettant aux dirigeants de gérer l’ensemble des opérations avec les différents partenaires et d’améliorer la gestion. Dans cette perspective, le développement des méthodes de comptabilité par activités représente une innovation susceptible d’améliorer la gestion de la valeur partenariale. Ces méthodes permettraient de mieux représenter le processus de création/répartition de la valeur, en prenant mieux en compte l’interdépendance entre les opérations de création et de répartition.

Les principes de gouvernance selon l'OCDE

L'Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) est une organisation internationale d'études économiques, dont les pays membres, principalement des pays développés, ont en commun un système de gouvernement démocratique et une économie de marché.

L’OCDE étudie depuis déjà un certain temps le sujet du gouvernement d’entreprise. En effet, elle est consciente que la qualité du gouvernement d’entreprise est un enjeu important qui intéresse des pans de plus en plus large de la population.
En 1999, elle a publié sa première version de ses principes de gouvernement d’entreprise qui a été par la suite révisé en 2004. Cette révision a pu bénéficier d’une vaste étude portant sur les moyens mis en œuvre par les pays membres pour surmonter les difficultés diverses rencontrées dans le domaine du gouvernement d’entreprise.

Les Principes de l'OCDE sont parmi les douze standards fondamentaux reconnus par le Forum sur la stabilité financière et ils sont admis comme référence par des organismes financiers internationaux. Le travail sur les Principes est mené par le groupe de direction sur le gouvernement d'entreprise.
L'OCDE, en coopération avec la Banque mondiale et des partenaires régionaux, a lancé des Tables rondes régionales sur le gouvernement d'entreprise en Asie, Eurasie, Amérique Latine, Russie et Europe du Sud-est.

En 1999, l'OCDE et la banque mondiale ont donné leur accord pour une coopération visant à promouvoir le gouvernement d'entreprise à l'échelle mondiale. En outre des tables rondes, ils ont établi le forum mondial sur le gouvernement d'entreprise.

L’OCDE définit la gouvernance d’entreprise ainsi :
« Le gouvernement d'entreprise vise à mettre en place des principes directeurs en matière de développement et de fonctionnement efficace du secteur de l'entreprise: l'entrepreneuriat, le droit des sociétés, la privatisation, la gouvernance des actifs appartenant à l'Etat et l'insolvabilité. Les programmes couvrent les pays membres de l'OCDE, ainsi que des économies émergentes et pays en transition »

Téléchargez les principes de gouvernance directement sur le site de l'OCDE : Principes de gouvernement d'entreprise de l'OCDE

Extension du Balanced Scorecard et des cartes stratégiques à la gouvernance


Pour une bonne gouvernance, le conseil d'administration a besoin d’outils afin d’améliorer sa capacité à obtenir de l’information nécessaire pour s’acquitter de ses responsabilités.
Il existe en comptabilité de management différent outils comme le Balanced Scorecard (tableau de bord équilibré) ou les cartes stratégiques qui pourraient répondre à cet objectif.

Ces dernières années, Robert Kaplan (créateur du Balanced Scorecard avec David Norton) a publié plusieurs articles sur ce thème et a ainsi ajouté un rôle supplémentaire au Balanced Scorecard qui a déjà une liste impressionnante de fonctionnalités.
Articles de Robert Kaplan:
- Mapping Your Board's Effectiveness (August 30, 2004)
- Boards and Corporate Governance: A Balanced Scorecard Approach - Robert S. Kaplan and Krishna G. Palepu (November 24, 2003)
- Improving Corporate Governance with the Balanced Scorecard - Robert S. Kaplan and Michael E. Nagel (July 5, 2006)

Avec le renforcement des règlementations suite aux scandales financiers, R. Kaplan estime qu’il y a un risque que les conseils d’administration deviennent trop concentrés sur la conformité aux règlements et sur les questions de gouvernance. Par conséquent, la stratégie globale de l'entreprise risque de ne pas recevoir toute l'attention qu'elle mérite.
Kaplan a ainsi repéré une opportunité pour son tableau de bord équilibré : avec seulement peu de temps disponible pour examiner l'information avant les réunions et à s'acquitter de leurs fonctions de surveillance et de gouvernance, les membres du conseil d’administration doivent recevoir l'information qui est la plus pertinente pour faire face à leurs responsabilités en matière de gouvernance et qui leur permettra de participer plus efficacement aux discussions lors de la réunion du conseil.

L'extension de la Balanced Scorecard et des cartes stratégiques aux membres du conseil d'administration va leur permettre de s'acquitter de responsabilités de façon plus efficace. Premièrement, le conseil d'administration doit utiliser la carte stratégique de l’entreprise et son tableau de bord équilibré, qui, ensemble, décrivent la stratégie de l'entreprise, à titre de sources d'information. Deuxièmement, il doit produire tableau de bord (Board Scorecard) expliquant clairement les responsabilités et les obligations de rendre des comptes des administrateurs. Cela fournit un mécanisme pour le conseil d'administration pour fixer ses objectifs et évaluer les résultats obtenus ultérieurement.

Les logiciels d'aide à la gouvernance

On a vu précédemment que des outils comme le Balanced Scorecard ou les cartes stratégiques pouvaient venir en aide au processus de gouvernance d’entreprise. Pour cela, il existe des logiciels spécifiques permettant d’élaborer de tels outils.

Voici une liste non exhaustive de logiciels spécifiques pour l’élaboration de Balanced Scorecard. La plupart de ces logiciels requiert des milliers de dollars et des mois d’installations et nécessite par la suite de la formation et de l’entretien.

ActiveStrategy Enterprise (ASE)
Cognos® Metrics Manager
Comshare MPC™
Corporater Balanced Scorecard suite
CorVu5
Crystal Decisions Balanced Scorecard Solution
Bizzscore®
Dolphin Navigator System
InsightVision
Nexance Performance Management
Pilot’s Performance Management Solution
Prodacapo Balanced Scorecard
QPR ScoreCard
Strategy2Act
Executive Dashboard
Scoreboard




Il existe également d’autres logiciels intégrant une multitude de fonctions mais beaucoup plus compliqués.
L’un d’eux est le logiciel « Microsoft Office PerformancePoint Server 2007 » qui aide les organisations à améliorer les performances en intégrant la surveillance, l'analyse et la planification en une seule application.
Vous trouverez toutes les informations sur ce logiciel ici – sur ce site vous trouverez des vidéos et des études de cas d’implantation de ce logiciel dans des entreprises.


La vidéo suivante est un exemple d'utilisation d'un logiciel pour élaborer des Balanced Scorecard et des cartes stratégiques







Le souci de gouvernance au cœur de l’entreprise : le cas Arcelor

Le groupe Arcelor, aujourd’hui ArcelorMittal, s'est engagé depuis sa création à respecter les règles et les principes de gouvernance d'entreprise. Il est particulièrement soucieux des règles de bonne gouvernance d’entreprise en termes de transparence, de qualité de l’information et d’équilibre des pouvoirs. Le groupe a ainsi établi une communication financière de haute qualité avec les investisseurs et les actionnaires. Dans ces documents financiers, l’entreprise a également modifié sa terminologie en remplaçant le terme shareholder par celui de stakeholder, avec ce que tout cela implique.

Le groupe a aussi un espace dédié à la gouvernance d'entreprise qui a été intégré à son site web et qui fournit un vaste ensemble de documents de référence concernant la société.
De plus, sur son site internet, l’entreprise publie différents indicateurs montrant son respect des règles et des principes de gouvernance d’entreprise. On peut y voir également les différents tableaux de bord qui ont été mis en place au cours des dernières années.

Recommandation de l'ICCA sur le contrôle

La gouvernance d'entreprise au Canada

La réponse canadienne à la Loi Sarbanes-Oxley (SOX) s’est traduite par des réformes instaurées de façon fragmentée au cours des dernières années. Des décisions ont été émises par les 13 organismes provinciaux de réglementation des valeurs mobilières au Canada. Les exigences continuent d’évoluer et la plus récente est un avis des Autorités Canadiennes en Valeurs Mobilières (ACVM), émis en mars 2006, qui propose certains changements importants concernant les attestations du contrôle interne à l’égard de l'information financière.

La réglementation en matière de gouvernance évolue donc sans cesse au Canada, et il y est par conséquent difficile pour les sociétés et les conseils d’administration de se tenir au fait des règlements. En effet, chaque ensemble de règles et d’exigences ne peut être évalué indépendamment des autres. Les émetteurs canadiens assujettis doivent adopter un point de vue global en ce qui concerne chacune des exigences, puisque les responsabilités mentionnées dans un règlement ont une incidence sur celles qui sont prescrites dans un autre règlement.

Au Canada, la réglementation des marchés financiers est influencée par le public, les organismes de réglementation des valeurs mobilières, les actionnaires institutionnels et le milieu des affaires. Il existe deux types de pressions contradictoires : le besoin d’une harmonisation avec les États Unis, étant donné que les sociétés intercotées représentent environ 60 % de la capitalisation boursière totale du Canada, et le besoin de s’adapter à un contexte commercial de sociétés à faible capitalisation et de sociétés contrôlées. Au Canada, la grande majorité des sociétés compte pour 40 % de la capitalisation boursière.

La réforme des marchés financiers canadiens regroupe trois volets :
- L’information financière qui comprend la surveillance des vérificateurs, les exigences relatives aux comités de vérification et les exigences concernant l’attestation des documents intermédiaires et annuels par le chef de la direction et le chef des finances.
- L’information sur la gouvernance qui comprend la surveillance de la gestion par le conseil.
- La loi concernant la responsabilité civile qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2006 et qui a généré un risque accru pour les administrateurs de société.

Ces changements ont des répercussions d’une portée considérable sur toutes les personnes concernées par l’amélioration de la gouvernance des sociétés. Par exemple, les vérificateurs et les comités de vérification doivent faire preuve d’une plus grande rigueur en ce qui a trait à l’examen et à la publication des informations financières de leur société. Le chef de la direction et le chef des finances doivent certifier qu’ils ont conçu et supervisé les procédures et les contrôles appropriés de communication de l’information. Pour les attestations annuelles de 2006, ils devront également certifier la conception du contrôle interne à l'égard de l'information financière (CIIF).

L’évaluation de la gouvernance

L’ICCA a publié dans sa collection « 20 questions » un document permettant aux administrateurs d’évaluer leur gouvernance. Ce document s’intitule « 20 Questions que les administrateurs devraient poser sur les évaluations de la gouvernance » (février 2006) par Richard W. Leblanc, Ph.D. Cette publication vise à répondre aux objections et aux préoccupations des administrateurs et à offrir des indications sur la façon d’effectuer les évaluations au moyen d’un ensemble de questions assorties de commentaires.

D’autres organismes ou groupes ont également publié des articles ou des documents relatifs à l’évaluation de la gouvernance d’entreprise. Parmi eux, on peut citer le cabinet DELOITTE qui a consacré un site web entier sur le thème de la gouvernance appelé « Le Centre de gouvernance d’entreprise ». Le cabinet y présente les enjeux de la gouvernance d’entreprise aujourd’hui au Canada et publie tous les documents indispensables. Le site propose également des outils destinés aux entreprises afin d’évaluer leur gouvernance.

Le suivi et la gestion stratégiques de la performance : des mesures de la performance non financière pour améliorer le gouvernement d'entreprise

- L’ICCA (Institut Canadien des Comptables Agrées)

Le rôle de l’ICCA est de mener des recherches sur des sujets d'actualité dans le domaine des affaires, soutenir l'établissement de normes de comptabilité, de vérification et de certification pour les secteurs privé et public ainsi que pour les organismes sans but lucratif. Il publie également des recommandations sur le contrôle et la gouvernance, ainsi que des documents destinés à la profession comptable. Il élabore aussi des programmes de formation continue (et propose des liens d’organismes proposant également des formations) et représente la profession de CA (Comptable Agrée) sur la scène nationale et internationale.
La division Développement des connaissances de l’ICCA comprend plusieurs services : le Service des monographies, le Conseil sur la gestion des risques et la gouvernance (CGRG), le Conseil canadien de l’information sur la performance (CCIP) et les Services d’information. Ensemble, ces ressources fournissent une analyse des enjeux professionnels cruciaux et un traitement approfondi des projets et sujets d’importance stratégique pour le positionnement des Comptables agréés du Canada. Sur le site web de l'ICCA, vous pouvez avoir accès à un grand nombre de leurs publications, notammant leur collection "20 questions".
Vous y trouverez également un grand nombre de lien de sites se préoccupant également de gouvernance d'entreprise.


- Le rapport de recherche : « Le suivi et la gestion stratégiques de la performance : des mesures de la performance non financière pour améliorer le gouvernement d'entreprise »

L’ICCA a publié un rapport étudiant l'importance et le rôle des mesures de la performance non financière pour fournir au conseil d'administration et à la haute direction l'information nécessaire à un gouvernement d'entreprise efficace.

Ce rapport est le fruit d’un travail de recherche suite aux résultats d’un sondage sur les pratiques canadiennes en matière de mesures de la performance. Ce sondage avait pour objectif d’évaluer la proportion dans laquelle ces mesures convenaient aux priorités stratégiques établies par les sociétés.
Le rapport présente également une étude approfondie des pratiques de gestion de la performance de cinq grandes entreprises canadiennes : Nortel, Banque de Montréal, Nova, Syncrude et Noranda.

En conclusion, le rapport recommande que les CA et autres responsables des finances et de la publication de l'information portent leur regard au-delà de la comptabilité traditionnelle pour s'intéresser davantage à la mesure de la performance et aider la haute direction à élaborer et à présenter des mesures de la performance non financière. Pour cela, l’ICCA recommande de les intégrer dans un système efficace de suivi et de gestion stratégiques de la performance. Dans son rapport un tel modèle est présenté et illustré, ses principales fonctions sont les suivantes :
- relier la stratégie et l'évaluation de la performance,
- gérer les relations formelles et tacites avec les intéressés,
- utiliser la rétroaction pour favoriser l'apprentissage dans l'entreprise,
- communiquer et relier les mesures de la performance pour favoriser la compréhension et l'engagement.

Il est intéressant de noter que ces fonctions édictées par l’ICCA correspondent également aux fonctions d’un autre outil existant qui lui aussi accorde une importance aux éléments non financiers. Vous aurez bien évidemment reconnu la référence au Balanced Scorecard.


Le rapport de l’ICCA peut être commandé en ligne (Auteurs - John Waterhouse, Ph.D, Simon Fraser University et Ann Svendsen, Core Relation Consulting).

Le sondage est analysé dans un article du CAmagazine (mars 1999, p.37) intitulé "Bien mesurer la performance de l'entreprise (PDF)" rédigé par John H. Waterhouse.

Le guideline élaborer par le CMA Canada

CMA Canada (Certified Management Accountants) est un organisme d'autoréglementation qui établit dans l'intérêt du public des normes, des pratiques et des règles de conduite professionnelle rigoureuses en comptabilité de management.


En 2002, le CMA a publié en réponse aux scandales financiers un guide intitulé “A Balanced Scorecard for a Board of Directors" qui encourage l’application des nouvelles méthodes de comptabilité de management à la pratique de la gouvernance d’entreprise. Ce guide présente donc une approche unique pour l’amélioration de la gouvernance d’entreprise. Au lieu de recommander de nouvelles règles, des règlements et/ou des changements structurels au niveau des conseils d’administration, le CMA Canada prescrit l’application des principes du tableau de bord équilibré (Balanced Scorecard) dans la gouvernance d'entreprise pour permettre à l’entreprise de renforcer son contrôle interne et externe. Ce guide développe également le rôle comptabilité de gestion dans la conception, la réalisation et la gestion des systèmes de gouvernance des entreprises.


En élaborant un tableau de bord équilibré pour évaluer et améliorer la performance du conseil d’administration, ce dernier devrait être en mesure de comprendre et de déterminer les relations de cause à effet de leurs actions sur la valeur actionnariale, et ceci en focalisant leur attention sur les facteurs de réussite de l'entreprise. Le tableau de bord équilibré peut aussi aider à établir les bons indicateurs de performance et la façon dont sa performance affecte la valeur pour les actionnaires et, plus important encore, les leviers que les conseils d’administration peuvent tirer pour améliorer à la fois la performance du conseil d'administration et de l'entreprise. La figure 1 (cliquer sur l'image pour une meilleur définition du schéma) indique où le tableau de bord s'intègre dans les moteurs de performance de l'entreprise.

En appliquant les principes du tableau de bord équilibré, les conseils d'administration de sociétés peuvent ainsi exécuter plus efficacement leurs responsabilités de « due diligence ». Les conseils qui utilisent le tableau de bord équilibré bénéficieront également d'une meilleure capacité à communiquer clairement l'information sur la performance avec les cadres, les employés et l’ensemble des investisseurs. Le nouveau guide couvre un éventail de questions de « corporate govemance », notamment :

- La définition des rôles et des responsabilités du conseil d'administration,

- L’évaluation des risques opérationnels et vigilance à ce que les risques soient bien gérés par des cadres supérieurs,

- L’évaluation de la performance des comités d’audit et de compensation,

- L'élaboration d'approches novatrices à la détermination de la rémunération des cadres supérieurs,

- Assurer le respect de l’éthique et la conformité,

- L’évaluation de la performance de l'entreprise et de cadres supérieurs, y compris le chef de la direction,

- Offrir l'accès au conseil d’administration par les employés et vice versa, y compris la possibilité de dénonciation (whistleblowers) des employés aux membres du conseil,

- La communication sur le CEO et la performance de l'entreprise aux employés et aux intervenants externes, y compris les actionnaires et les autres investisseurs.


Rappel sur le tableau de bord équilibré (Balanced Scorecard) :

Le tableau de bord équilibré est un système de gestion de la performance stratégique qui relie la performance à l'aide d'une stratégie multidimensionnelle utilisant des indicateurs d'information financière et non financière. Il utilise une combinaison de données financières et non financières qui portent sur des indicateurs de performance d'une entreprise, des processus opérationnels internes, les intérêts financiers des actionnaires, la création de valeur pour les clients, et de l'apprentissage organisationnel et de la croissance.


Liens :

Vous pouvez commander en ligne la version électronique ou le CD du guide du CMA Canada (6500 – Corporate Governance Accountability).

Lire également un article très intéressant sur le site web du magasine CMA Management « Keeping Score » (décembre 2002, Janvier 2003), portant sur la publication du guide.

vendredi 18 avril 2008

Le rating de la gouvernance d'entreprise

La gouvernance d’entreprise est un des éléments clé de la confiance des investisseurs. A ce titre, elle participe à la création de valeur de l'entreprise. Les entreprises ont donc intérêt à communiquer sur les mécanismes de gouvernance qu'elles ont mis en place pour assurer la qualité de leurs décisions. En France, par exemple l’AMF (Autorités des Marchés Financiers) recommande aux entreprises de rédiger un chapitre spécifique sur le gouvernement d’entreprise et le contrôle interne dans leur document de référence.

A part en lisant les documents publiés par les entreprises qui ne sont pas toujours très objectifs, comment peut-on apprécier la qualité d’une entreprise dans ce domaine ? C’est là qu’intervient d’autres organismes bien connus : les agences de rating. La multiplication des codes de bonne conduite en matière de gouvernance (ou code d’éthique), les réglementations boursières et la transparence des entreprises leur permettent à présent d’élaborer un système d’analyse précis pour apprécier la qualité des systèmes de gouvernance mis en place par les entreprises.

On peut aujourd’hui identifier deux types d’acteurs effectuent régulièrement des analyses de gouvernance au profit des investisseurs:

· Les agences de rating classiques - Elles s’intéressent davantage à cette question qu’auparavant, mais le font aujourd’hui de manière beaucoup plus structurée. La gouvernance fait ainsi simplement l’objet d’une attention structurée dans le cadre de la notation classique.
· Des spécialistes de la gouvernance - Ces firmes sont elles spécialisées dans le conseil aux actionnaires et elles ont développé de véritables systèmes de notation : leurs grilles d’analyse de la gouvernance donnent lieu à une note.

Les approches de ces agences de rating ont récemment fait l’objet d’une recherche conduite par deux chercheurs de l’IAE de l’Université de Lyon (Fabrice ROTH et Amir LOUIZI). Leur étude s’intitule « Evaluation du Gouvernement d’entreprise par les Agences de Rating : Une analyse comparative des méthodes ». Cette étude cherche à mettre en évidence les similarités et les différences entre les deux types d'agence de rating. Les conclusions des auteurs sont que ces approches ne sont pas homogènes.

Ce sujet du rating de la gouvernance d’entreprise est assez à la mode puisque Les Echos du 29 février 2008 consacrent également deux articles sur ce sujet : « Noter la gouvernance pour mieux prévoir la performance » et « Une démarche balbutiante mais prometteuse » desquels il ressort que, si des progrès restent à faire et si l’efficacité de la démarche doit être encore démontrée, le domaine est très prometteur.